jeudi 1 mai 2008

La cueillette des pousses de bambou

Les bosquets de bambou (竹) entourent souvent les temples japonais. Les splendides jeux de lumière et le délicat bruissement des feuilles au moindre coup de vent s'accordent bien à l'esprit des lieux et incitent à la méditation. Cette plante exceptionnelle a aussi des usages moins spirituels. Il est le végétal a la croissance la plus rapide, atteignant parfois un mètre par jour. Cela a inspiré des méthodes de torture ignobles à certains peuples asiatiques, sur lesquelles il n'est pas nécessaire de s’étendre. Très résistant et léger, le bambou est aussi utilisé en Chine pour construire les échafaudages pour la construction de gratte-ciel. Les pousses de bambou (竹の子) sont un met délicat et printanier au Japon. Elles se cueillent en avril. Nous partirons donc aujourd'hui dans la péninsule de Boso (房総半島) près de Tokyo équipés d’une bêche, d'un grand panier, et de gants.
Certaines espèces de bambou fleurissent seulement tous les cinquante ans. Cet évènement a des conséquences importantes dans les sociétés agricoles, car l'abondance de fruits de bambous mène à une multiplication des rongeurs qui ravagent souvent les récoltes. La mort simultanée des bambous adultes après la floraison prive souvent l'artisanat local de son matériau de base. Entre deux floraisons, le bambou s'étend par clonage naturel. Chaque plant crée au printemps un ou plusieurs « clones » Ceux-ci sont reliés à leur parent par la racine au début de leur vie. Les premiers jours, seule une pointe verte de 3 à 4 centimètres sort de terre. C'est à ce moment que la pousse doit être cueillie, car elle est encore tendre. Dès qu’un cône sort de terre, il est trop tard car le végétal a commencé à se solidifier.
Pour cueillir une pousse, il est d’abord nécessaire de creuser la terre sur 30 centimètres de profondeur pour dégager la pousse jusqu’à sa base. On prendra garde à ne pas abîmer la précieuse racine en bêchant. Puis, on la sépare de son parent. Pour cela, on doit déterminer la direction de la racine parentale en observant les courbures des feuilles vertes au sommet de la pousse. Les feuilles sont recourbées dans la direction du parent. Un vigoureux coup de bêche du côté du parent à la base de la pousse permet de la détacher facilement.
Une après-midi de cueillette apportera un peu d’exercice physique, et constitue un excellent prétexte pour découvrir la campagne japonaise. De nombreux bois de bambous privés proposent l’accès à leur propriété pour quelques centaines de yens. La cueillette est sportive, et les mains peu habituées au jardinage souffriront un peu. Il est indispensable de s’équiper d’une paire de gants à tout faire (軍手) que l’on peut acheter dans tous les magasins de bricolage. Un grand panier permet aussi de transporter les pousses qui sont souvent de belle taille. Une grande casserole sera aussi indispensable pour les cuire.
La cuisine japonaise assaisonne le bambou de nombreuses façon. Avant de le cuisiner, il faut d’abord faire bouillir les pousses de bambou à l’eau pendant 1 à 2 heures avec du son de riz (米ぬか). Il est nécessaire de les cuire le plus vite possible après leur cueillette pour préserver la saveur. Puis les pousses devront reposer une nuit dans l’eau de cuisson. Le lendemain, pelez la pousse pour dégager la chair de bambou.
Une recette simple est celle du riz au bambou. Lavez 3 coupes de riz (540 ml), et placez les dans le cuiseur de riz. Ajoutez 2 cuillères à soupe chacun de sake de cuisine (酒), de mirin et de sauce de soja (醤油) ainsi qu’environ 1 coupe de petits morceaux de pousse de bambou déjà précuit. Ajoutez y deux tranches de tofu frit coupé en lamelles(油揚げ), et deux cuillères à soupe de « dashi », le bouillon japonais. Rajouter de l'eau au niveau indiqué par l'appareil, et faites cuire le riz. Après la cuisson, remuer délicatement le riz pour l'aérer, et laisser reposer 30 minutes avant de servir. Ceux qui ne disposent pas d'un cuiseur automatique peuvent préparer le riz à la japonaise dans une casserole couverte à feu très doux en ajoutant le même niveau d'eau que de riz.
Vous pouvez continuer votre lecture en admirant les cerisiers en fleur.
Accès à un parc à bambou : Le parc « yamada » à Yokosuka est accessible par les transports en commun et en voiture depuis Tokyo. Il est ouvert tous les jours de 10h à 15h. L’entrée au parc est de 500 Yens par personne, et des outils sont mis à disposition gratuitement. Le parc est accessible depuis la ligne Keihin Kyuko (京浜急行), gare de YRP Nobi (野比). Il est préférable ensuite de prendre le bus en direction de TsushinKenkyusho (通信研究所) ou YokosukaShiminByoin (横須賀市民病院) et de descendre à l’arrêt « Sengen Jinja » (浅間神社). Propriétaire : M Sato Yamada 山田聡(Téléphone : 090.1530.3576. Adresse : 6-33-12 Nagesawa, Yokosuka, Kanagawa 239-0842神奈川県横須賀市長沢6-33-12). Site : http://yasai-jp.com/ . Une recherche sur internet permettra certainement à nos lecteurs de trouver d’autres adresses.
Mise en garde : Les pousses de bambou crues peuvent être très toxiques. Il convient donc d’éviter la cueillette sauvage, et de se rendre dans une exploitation de bambou sérieuse. Le prix d’entrée est souvent modique. Il est également indispensable de cuire longuement les pousses à l’eau bouillante, ce qui détruit le composant toxique. Cela est valable pour les pousses cueillies soi-même, et pour les pousses achetées en supermarché. La cuisson dégage une odeur d’ammoniac légèrement désagréable, et il conviendra donc de bien aérer sa cuisine.

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