lundi 19 avril 2010

Vacances au Japon, courtoisie du volcan

Les tremblements de terre, les éruptions et les fréquents ouragans de l’archipel japonais n’ont jamais retardé les voyages de votre bien inconstant serviteur de plus d’une demi-journée. Et c’est à cause d’un volcan islandais et peut-être des administrations européennes que je suis bloqué depuis ce week-end dans les environs de Tokyo. Je devrais pouvoir rentrer dans une semaine en France, mais cela n’est pas certain.
Il n’est jamais agréable de voir ses plans contrariés, et les perturbations actuelles du transport aérien sont semble-t-il sans équivalent dans l’histoire moderne. Toutefois, dans l’échelle des contretemps, cette aventure n’est pas extrêmement grave : quelques centaines d’euros de faux-frais, et une semaine de congés payés pas vraiment prévue, mais que j’essaierai de rendre agréable et utile, par exemple en écrivant ici. C’est probablement moins grave que de se faire voler sa voiture, et certainement beaucoup moins ennuyeux qu’une grosse fuite d’eau à son domicile.
Je peux d’autant moins râler que le Japon propose un nombre important de services très pratiques à prix modéré qui permettent de gérer ce genre de situations : le "business hotel" qui m’héberge en plein centre de cette ville de 500.000 habitants propose des chambres doubles (équivalentes à un bon deux étoiles français) pour 9000 Yens (73 Euros), petit déjeuner abondant, nécessaire de toilettes, bouilloire pour le thé et connexion internet par câble haut débit compris. Le pressing coûte 300 Yens (2.50 Euros) par chemise pour une qualité impeccable. Toutes les gares proposent des consignes automatiques. Et l’on peut trouver partout des restaurants et traiteurs à bon marché, comme ce restaurant de soba que j’ai découvert à Tokyo où l’on mange un repas chaud et diététique pour environ 450 Yens (3.6 Euros). Pour une semaine, ce serait certainement lassant, mais l’on peut faire un voyage entier en prévoyant environ 1000 Yens par repas par personne. 6 jours au Japon dans des conditions confortables mais non luxueuses me coûteront donc environ 81600 Yens (665 Euros) pour deux personnes hors transports et loisirs, mais sourire compris. En France, dans une ville de Province équivalente, une prestations comparable mais probablement de qualité inférieure (*) reviendrait probablement à prêt de 1000 Euros, soit 50% de plus. Comparer des prix comme cela est toujours imprécis, mais l’expérience laisse l’impression que l’on en a plus pour son argent au Japon que dans notre beau pays. Ayant des attaches dans les deux pays, je réfléchirais sans doute longuement avant de m’installer dans l’un ou l’autre pays, et si je devais un jour monter mon entreprise, il est possible que je choisisse de partir avec mes idées au Japon ou ailleurs.
D’autant que la crise du volcan islandais a probablement révélé une autre faiblesse de notre vieux continent. Les cendres volcaniques sont certes dangereuses pour les moteurs d’avion. Il y a en particulier eu un incident en 1983 qui a provoqué l’arrêt de quatre moteurs d’un avion en Indonésie. Le contexte était aussi particulier, avec la mort du president polonais dans un accident d’avion quelques jours avant les perturbations actuelles. Toutefois, il n’y a eu à ma connaissance aucun accident majeur dû aux cendres volcaniques ayant entraîné des pertes de vie sur un vol commercial. Une fois sorti du nuage volcanique, les moteurs redémarrent en effet. Même un arrêt total des moteurs, si cela devait arriver, permettrait certainement aux avions au dessus de l’Europe de rejoindre une piste, un avion à 10000 mètres d’altitude pouvant planer sur plus de 100 kilomètres. La manœuvre n’est évidemment pas recommandée, mais c’est un élément de plus pour relativiser le risque.
Les vols de tests effectués hier dimanche par Air France et Lufthansa n’ont relevé aucune influence sur les avions, il est probable que le nuage de cendres au dessus de l’Europe, très dilué, n’ait pas provoqué d’incidents. Les services météorologiques, armées et directions de l’aviation civiles auraient pu probablement effectuer des mesures plus précises, pour définir des zones de faible danger dans lesquelles on pouvait faire transiter des avions, sans plus de risque que celui lié, par exemple, à un pilote distrait. Je ne suis évidemment pas spécialiste, mais j’ai une suspicion très forte que l’analyse de risque n’a pas été réalisée correctement, au nom d’un principe de précaution excessif.
J’ai vu également peu de solutions créatives mises en place, alors que les aéroports d’Afrique du Nord, ou du sud de l’Europe (tous à moins de 48 heures de la France en bateau ou en bus) ont pu rester ouvert. On aurait même pu imaginer des transferts en avion de transport militaire pouvant probablement supporter la poussière volcanique. Un ministre a bien évoqué des transferts en train depuis Moscou pour les passagers en Asie, mais 5 jours après le début des évènements, aucune de ces solutions n’est en place. Une connaissance se marie le week-end prochain en Europe avec son conjoint japonais, et je suis sûr que la famille japonaise aurait accepté de faire 2 jours de transfert en bus si nécessaire pour assister à cet évènement unique. Des commerciaux en route pour la négociation de leur vie étaient probablement prêt à un Palerme-Paris en train couchette pour être là à temps. Il y a certainement des contraintes logistiques qui font que certaines de ces alternatives sont de fausses bonnes idées. Mais en plus du principe de précaution, cela laisse l’impression d’une certaine paresse intellectuelle de nos politiques. Et tout ceci coûte cher : il faudra chiffrer précisément les impacts de la crise, mais les milliards envolés en avions et en hôtels vides ont aussi un prix en vies humaines.
Les incidents volcaniques de ces derniers jours sont aussi une bonne occasion de réfléchir sur la dépendance de notre société envers les avions à réaction, une technologie de pointe, qui a besoin du pétrole. Le transport aérien a une place plutôt marginale dans l’économie, et si l’on est en rupture de stock de mozzarella italienne ou de macarons “Made in France” au Japon, cela n’est pas très grave pour le tout-venant. Certains industriels peuvent être plus importunés si par exemple, une pièce de rechange devant voyager par avion bloque une machine importante dans une usine. Les communications, de leur côté sont à peine perturbées: avec Internet, on se soucie à peine que le courrier international n’arrive plus. C’est pour le transport de personne intercontinental que l’avion reste incontournable. Un homme politique visionnaire pourrait sans doute lancer le projet d’une ligne grande-vitesse trans-sibérienne qui donnerait une alternative aux voyages en avion plus lente, et probablement plus coûteuse, en tout cas tant que le carburant des voyages internationaux est détaxé (**). En attendant, les passionnés du Japon feraient bien de déposer des cierges devant les locaux de Rolls-Royce, d’Airbus et de Total qui leur permettent d’assouvir leur passion.
Annexes

J'ai découvert à l'occasion de mon retour en France un solution économique et pratique pour une dernière nuit au Japon avant un avion tôt le matin: L'hôtel Nikko de Narita (ホテル日航成田) propose des chambres doubles confortables à environ 10.000 Yens (86 Euros) la nuit, ainsi qu'un service de bus depuis la gare de Tokyo (départ 21:30 ou 23:45) ou Haneda (départ 21:00 ou 23:15) à 1500 Yens par personne (13 Euros) depuis Tokyo (les bus et le Narita Express coûtent environ 3000 Yens (26 Euros) sur la même distance). La réservation est possible en anglais sur le site ( http://www.nikko-narita.com/english/ ). Le détail du service de navettes de bus est disponible sur la page http://www.nikko-narita.com/access/bus_01.html (japonais uniquement)

(*) Estimation en France basée sur un 3 étoile entrée de gamme à prix discount à Nantes (90 Euros petit-déjeuner compris, + connexion internet 10 Euros / jour), deux chemises au pressing (5 Euros par pièce), un déjeuner dans une boulangerie (7 Euros / personne) et un diner dans un restaurant bon marché à 20 Euros par personne.

(**) si l’on applique les taxes en vigueur dans l’automobile (de l’ordre d’1 euro par litre) sur le carburant aérien, on obtient un surcoût de 600 Euros par personne par aller-retour avec le Japon en se basant sur une consommation de 3 litres au 100 km par passager.

3 commentaires:

Unknown a dit…

Bonjour, je n'ai pas encore pris l'habitude d'écrire sur votre blog mais je corrige cela encore merci pour vos écris et j'attend le prochain avec grand plaisir :)

Dyane Auteur a dit…

Quelle belle photo, quelle grandeur !
Merci c'est magnifique :)

Devenir Riche a dit…

Très impressionnant effectivement